Pourquoi la peur fait vendre et comment l’utiliser
Avez-vous déjà remarqué de quelle manière tout le monde se retourne au son d’une sirène de pompiers ? Il se passe la même chose lorsqu’un accident de voitures se produit : tout le monde ralentit au niveau des accidentés pour regarder la scène.
A chaque fois qu’un évènement épouvantable a lieu notre curiosité est incapable d’y résister. Cet aspect primitif, inhérent à la nature humaine, est fréquemment utilisé par les professionnels du marketing pour attirer l’attention de clients potentiels.
Il suffit de regarder les infos pour s’en rendre compte.
C’est comme si le journal de 20h inventait tous les soirs un nouveau produit potentiellement mortel, une nouvelle inondation sur le point de se déchaîner ou une nouvelle flambée de violences.
Pourquoi ?
Parce que la peur fait vendre.
En promettant de révéler des informations sur les derniers produits retirés du marché ou sur l’insécurité sanitaire, les rédactions attirent davantage de téléspectateurs. C’est bien simple, tout le monde veut savoir quelle est la nouvelle menace dont il faut avoir peur.
Plus la peur augmente, plus le nombre de téléspectateurs augmente et plus le nombre de téléspectateurs augmente, plus les recettes de publicités augmentent. L’équation n’est pas plus compliquée.
Beaucoup de gens détestent ces phénomènes médiatiques qui jouent sur la peur – moi le premier – mais personne ne peut nier leur efficacité. Ce n’est pas pour rien que les meilleurs spécialistes en marketing cherchent systématiquement à utiliser la peur pour vendre leurs produits.
Voici pourquoi :
La peur influence chacune de nos décisions d’achat
Le produit que vous vendez a en fait peu d’importance. Chaque décision d’achat prise par un client l’a été, au moins en partie, grâce à la peur.
C’est plus évident pour certains produits que pour d’autres. Par exemple, on achète une alarmes antivol parce qu’on craint de se faire cambrioler. De la même manière, on choisira une voiture qui inclut des airbags et ayant reçu de bonnes évaluations de sécurité par peur d’être blessé ou tué dans un accident de voiture. La boutique de détecteurs de fumée Incendom l’a bien compris en affichant à ses visiteurs un lien vers les incendies mortels les plus récents sur sa page d’accueil !
Mais est-ce que cette loi se vérifie également lorsqu’on achète un produit plus neutre par exemple, un jouet pour enfant ?
Imaginons un scénario classique
Nous sommes trois semaines avant Noël et votre enfant de dix ans vous confie sa lettre au père Noël. Tout en haut de la liste figure une Nintendo Wii. C’est ce qu’il aimerait plus que tout au monde et il supplie Papa Noël de lui en apporter une.
Au début, vous n’êtes pas tellement emballé par l’idée. Vous pensiez plutôt lui offrir sa première collection d’encyclopédies ou un ordinateur portable ou des leçons de karaté bref, un truc qui lui sera utile.
Puis vous imaginez le matin de Noël. Son visage illuminé par la joie, il dévale les escaliers et se précipite vers le paquet volumineux qui ressemble à une Nintendo Wii. Il arrache le papier cadeau les yeux brillant d’excitation, et découvre… une collection d’encyclopédies flambant neuve.
L’excitation se transforme alors en amertume et ses yeux se remplissent de larmes… Il refusera de sortir de sa chambre pendant le reste de la journée et le soir il vous demande si le Père Noël existe vraiment. Vous êtes obligé de lui avouer que non, et sa déception se transforme en colère lorsqu’il réalise qu’en fait c’est vous qui lavez laissé tomber. Le soir, en le bordant, vous vous rendez compte que rien ne sera plus jamais comme avant et vous vous haïssez de ne pas avoir acheté cette foutue Nintendo Wii.
Ce n’est peut-être que mon imagination qui s’emballe mais je parie que cela vous effraie suffisamment pour que vous vous soyez déjà retrouvé la veille de Noël à foncer au centre commercial pour faire la queue derrière 500 autres parents qui veulent acheter une Wii – comme vous.
La vérité c’est qu’on peut vendre n’importe quoi en s’aidant de la peur. Il suffit juste de savoir comment l’utiliser.
Une question simple mais efficace
Pour savoir quel type de peur va motiver un achat (et c’est valable pour n’importe quel produit), commencez par vous interroger sur les raisons qui motivent vos clients à acheter vos produits. Une fois que vous avez résolu ce problème, posez-vous cette question simple mais terriblement efficace :
Quelle est la pire chose qui pourrait arriver au client ?
Par exemple, lorsqu’une femme achète des vêtements de créateur, elle veut être belle, elle veut de la qualité et elle veut probablement impressionner son entourage. A priori, ce n’est pas grave si finalement elle n’achète rien, n’est-ce pas ? A priori.
Maintenant, demandez-vous quelle est la pire chose qui pourrait lui arriver en relation avec cette robe ?
D’abord, elle pourrait très bien ne pas être promue parce que son patron pense qu’elle n’a pas la l’allure qu’on doit attendre d’un leader. Ou peut-être rencontrera-t-elle demain l’amour de sa vie, habillée d’un simple jean et d’un sweat, et qu’il l’ignorera à cause d’une fille plus jolie portant des vêtements de créateur. Ou alors ce sont ses amies qui vont se mettre à la dénigrer derrière son dos en se demandant pourquoi elle n’est pas capable d’acheter des vêtements plus élégants; chose qu’elle pourrait entendre et qui pour certaines personnes serait humiliant.
Bref, que des motivations très puissantes, basées sur la peur.
Maintenant, répondez-moi franchement : votre cliente a-t-elle acheté parce qu’elle avait envie d’être belle ou parce qu’elle craignait de se retrouver isolée au boulot, ignorée par l’amour de sa vie et méprisée par ses amis ?
Ouai. C’est bien ce que je pensais…
Les gens achètent du réconfort
Peu importe l’acheteur et l’objet de son achat : cette personne cherche à se rassurer, elle veut avoir la certitude que son achat effacera ses craintes.
Si je paye pour un programme de sauvegarde automatique pour mon ordinateur, j’ai besoin qu’on m’explique que je n’aurais plus à m’inquiéter de perdre des fichiers. Lorsque j’achète le dernier livre « dont tout le monde parle » (c’est en tout cas ce que la première de couverture laisse entendre…), je veux être sûr de ne pas être exclu de la conversation au prochain diner auquel je serai invité. Si je décide d’acheter un nouveau portable, je souscrirai probablement à une assurance anti-vol et casse afin de ne pas me retrouver sans portable pendant plusieurs jours – même si je changerai probablement de portable sans avoir pu utiliser mon assurance.
Nous cherchons tous du réconfort. Lorsque vous peaufinerez votre message marketing, interrogez-vous sur les craintes de vos clients et répondez-y en leur montrant comment votre produit peut résoudre leurs problèmes. Réconfortez-les en leur donnant l’assurance qu’ils n’ont plus à s’en faire avec votre produit.
Est-ce que je ne risque pas de franchir une ligne jaune ?
Bien sûr.
Il suffit de regarder la campagne présidentielle qui vient de s’achever pour constater que les hommes et femmes politiques dépassent régulièrement les bornes et que c’est efficace. Les politiciens ont compris depuis longtemps que faire peur aux électeurs est une façon quasi certaine d’obtenir des votes. Celui qui dépeint la situation la plus horrifiante n’est néanmoins pas assuré de gagner et il finit généralement par se faire détester.
Alors, comment éviter de passer du côté obscur ?
Je ne connais qu’une seule méthode :
Dire la vérité
Si vous dites la vérité à vos clients et que celle-ci fait peur, c’est tout bon. Vous n’en serez que plus respecté.
Prenons l’exemple d’une vieille campagnes de pub internationale de FedEx. Avec des slogans tels que « Relax, c’est FedEx », ils jouaient sur la peur des vendeurs professionnels que leurs colis n’arrivent pas à l’heure ou pas du tout.
Cela a marché parce que c’était vrai : les expéditions retardées ou perdues étaient et sont toujours un vrai problème. Les délais d’expédition se sont certes beaucoup réduits depuis la première campagne de Fedex il y a 30 ans, mais il y a parfois des moments où vous voulez être absolument certain que votre colis arrivera en temps et en heure. Et dans ces cas-là, ça vaut le coup de payer FedEx.
La leçon ?
Soyez honnête.
Ce n’est pas la peine d’inventer ou de déformer la vérité dans le seul but d’effrayer vos clients. Un marketing basé sur la peur est nettement plus efficace lorsqu’il est réaliste et crédible. Trouvez une menace qui fait véritablement peur à vos clients, et utilisez-la ensuite pour les inciter à agir. La frontière est mince mais ce sont les règles du jeu auquel nous participons. Vous ne voudriez pas basculer du côté obscur de la force, n’est-ce pas ?